D’un coup, remonter à la surface. Quand j’étais petite c’était mon moment préféré, quand j’avais la tête sous l’eau, dans la piscine du camping. Le moment où le sommet du crâne brise la lame chlorée, où les oreilles se vident, où le monde et tout son bruit, toute son énergie, se jettent à nouveau contre les tympans. Le moment où je retournais, de mon plein gré, me heurter au chaos de la vie, alors qu’on est si bien sous l’eau. J’aimais nager comme on aime respirer, le soir venu quand il fallait retourner à l’ombre de la caravane pour y manger les saucisses et le taboulé, je regardais le bout de mes doigts fripés. Peut-être qu’un jour j’allais fondre, me dissoudre intégralement dans l’eau bleue qui sentait fort, je passerais entre les mailles du filet que le maître-nageur passait le long des bords en carreaux beiges qui râpaient le dos quand je voulais me hisser hors de la piscine. Quand j’étais petite il n’y avait pas de meilleur endroit que ces huit mètres sur dix-huit, c’était avant de grandir, avant de grossir maigrir changer vieillir.
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