Et puis, épuisée

Cela fait plusieurs semaines que j’essaye d’écrire cet article et que je ne trouve pas l’angle qui convient. J’ai envie, besoin même, de parler des questions que je me pose depuis des mois autour de la féminité, de ce que c’est d’être femme actuellement, mais comment parler de tout ça sans verser dans un pathos incroyable ? Je ressens un décalage si fort avec les comptes insta et la tendance warrior-sorcière-superwoman, je ne sais pas comment communiquer ces émotions intenses, et presque toutes négatives, qui m’envahissent dès que je réfléchis à tout ça.

Parce que je vais être très honnête : moi, en ce moment, je suis épuisée d’être une femme.

Avant d’être féministe, j’étais une fille et basta, ça n’était pas source de migraine. Après, je suis devenue féministe et il a fallu remettre plein de choses en question : pourquoi je dénigrais les filles plus féminines que moi, pourquoi je me forçais à m’épiler alors que je n’aimais pas ça, pourquoi je laissais les hommes commenter mon physique sans me défendre, pourquoi j’avais tout le temps peur dans la rue quand j’étais seule. C’était déjà fatigant mais je ne me sentais pas accablée par le poids d’un fardeau trop lourd pour moi. J’avais besoin de faire des breaks, c’est vrai. D’inventer des rituels sacrés pour célébrer mes règles, de lire des bouquins aux représentations genrées hyper normatives, d’oublier quelques secondes les chiffres qui me donnaient la nausée. (lesquels ? c’est bien simple, tous les chiffres, ils sont tous horribles)

Et puis après ça, j’ai été trahie par ma propre chair. Je suis tombée enceinte sous stérilet[efn_note]Ça arrive, oui, ce n’est pas courant, non. À chaque fois que j’en parle autour de moi, les femmes qui ont un stérilet me regardent d’un air épouvanté et je me sens obligée de les rassurer, comme si j’étais la seule au monde à qui ça pouvait arriver. Ce n’est pas le cas, et je n’ai plus trop en moi l’énergie de rassurer, désolée.[/efn_note]. J’ai vécu un déchirement qu’il est illusoire de vouloir mettre en des mots suffisants : celui de mettre fin à une grossesse qui n’aurait jamais dû survenir, alors même que j’ai en moi un désir d’enfant depuis de longues années. J’ai nourri, et je nourris encore, une colère noire contre cette vie (cette société, aussi) qui m’a forcée à faire un choix que je ne regrette pourtant pas. Comme la vie est compliquée.

Mais voilà depuis ce moment de ma vie j’ai l’impression que tout se complique encore. J’ai l’impression de subir. Subir mon corps, qui a eu du mal à se remettre de ses cinq toutes petites semaines de grossesse. Je subis mon syndrome des ovaires polykystiques qui me gâche la vie, ainsi que ma contraception parce qu’où que je pose mon regard, aucune solution n’est idéale. Je subis les séquelles d’une adolescence anorexique, parsemée de personnes néfastes, qui a mutilé le regard que je pose sur moi-même. Je subis la charge mentale, toujours si fort, quand mon nouveau stérilet se barre et que je dois compter s’il y a un risque, et je dois composer avec la terreur de tomber enceinte de nouveau, les rappels sur mon téléphone pour ne pas oublier ma pilule, l’attente des prochaines règles. Je subis l’humeur qui change, la rétention d’eau, l’irritabilité, je subis cette sensation poisseuse chaque mois avant de saigner, de n’être capable de rien, surtout pas de créer.

Je suis encore plus touchée qu’avant par ce que je sentais déjà : que je suis une femme, socialisée comme telle, et que si je veux exister dans ce monde, je dois constamment me faire violence. Dans une version utopique de la vie, je n’aurais pas besoin de me forcer à parler plus fort, je n’aurais pas besoin de fake it till I make it, je n’aurais pas à emprunter des manières plus viriles, et une confiance en moi que je n’ai pas. Parce que dans une version utopique de la vie, on respecterait les doutes, la fragilité, la tristesse et les vacillements, et on ne m’encouragerait pas à être quelqu’un d’autre que moi. De toute façon mon corps me trahit là encore (à moins qu’il soit justement trop fidèle cette fois) : quand je suis confrontée à une situation où je préférerais vraiment faire autre chose que semblant, je transpire d’une sueur âcre qui me confirme que je vais contre ce que je suis. J’allais dire « contre ma nature », mais pas vraiment, contre ma culture peut-être, contre ce que j’ai été éduquée à être[efn_note]Il paraît qu’on appelle ça « sortir de sa zone de confort », écoutez au bout d’un moment, rester dans sa zone de confort ne me paraît pas non plus délirant, comme désir.[/efn_note].

Je suis épuisée d’être féministe, mais là encore, que puis-je y faire ? Je ne peux pas prendre des vacances de ma condition d’opprimée, ni de mon empathie face aux horribles choses qui se déroulent partout dans le monde. Je suis épuisée pourtant, et en colère aussi, d’être une porte-parole permanente de ma cause mais de parler dans un aquarium. D’écrire ces articles féministes que seules des femmes liront. De lire ces livres féministes et d’en parler avec d’autres femmes. Je n’écoute aucun podcast féministe, d’ailleurs, parce que j’en ai ras-le-bol, de ce contenu qui ne m’apprend pas grand-chose[efn_note]Je ne dis pas ça pour me vanter, il se trouve juste qu’en quasiment 10 ans de féminisme et de passion pour la lecture, je suis relativement au fait de beaucoup de sujets qui sont maintenant abordés de façon plus mainstream.[/efn_note], et je suis écœurée de voir si peu d’hommes prendre leur place (silencieuse et humble) dans la discussion. À quoi servent tous ces podcasts et tous ces articles et tous ces livres, si ce sont les femmes qui les achètent, les consomment et ensuite les régurgitent aux hommes de leur entourage ? Qui indemnise le temps passé, l’énergie gaspillée, à faire les profs d’hommes trop fainéants, trop égoïstes et trop vaniteux pour se renseigner par eux-mêmes ?[efn_note]Vraiment pas la peine de m’écrire pour me dire que tous les hommes ne sont pas comme ça. Merci d’avance ![/efn_note]

C’est pour ça, peut-être, que je ne m’identifie pas du tout aux mouvements d’auto-gratitude, de célébration de la féminité. Être une femme et en prendre conscience m’a rendue plus dure, envers moi-même et envers les autres. (je n’ai vraiment plus aucune patience pour les hommes, par exemple, et ne suis pas prête de m’en excuser) Je suis plus forte, aussi, c’est vrai. Je sais mieux dire non, je connais mieux mon corps, j’ai de bien meilleurs outils pour gérer les conflits que ceux avec lesquels je partais au départ, je me laisse moins faire et je fais mieux semblant. Mais je suis persuadée que j’aurais pu acquérir toutes ces savoirs sans la violence inhérente à une société qui ne veut pas vraiment de nous, qui ne sommes pas des hommes blancs cis hétéros valides, vieux et riches de préférence. J’aurais pu faire sans toutes les micro-agressions d’un quotidien qui n’a pas de place pour les doutes. J’aurais pu apprendre dans la douceur.

Être une femme m’apporte également des joies insoupçonnées, bien sûr que c’est vrai. Quand je lis un excellent livre écrit par une femme brillante, je suis submergée de l’émotion d’être inspirée, et je m’autorise aussi (ce que je n’aurais jamais fait avant) à m’inclure dans le cercle de ces femmes créatrices, je m’autorise à me sentir proches d’elles. Quand je pense aux femmes qui m’entourent, incroyables dans leur force, leur refus du compromis, leurs talents, je suis remplie d’une gratitude incroyable, car je sais enfin reconnaître que le travail, la chance et le bonheur de mes sœurs ne diminuent pas la valeur des miens.

Mais moi, je n’ai jamais eu le courage d’être un role model, une femme « inspirante ». Pour exister, les femmes doivent soit rentrer dans les cases (existons-nous alors vraiment ?), soit en sortir de manière totale, radicale et revendiquée. Que de travail, là encore. Je m’en faisais la réflexion alors que je pondérais encore une fois sur ma pilosité cet été : raser ? pas raser ? J’ai réalisé que dès lors que je sortais jambes poilues apparentes, j’avais tendance à mieux m’habiller, me coiffer, et même à me maquiller, portant ainsi l’image d’une féministe assumée, dont les poils sont un message, un étendard. En vrai, je suis juste une grande fainéante atteinte d’hyperpilosité, mais sans mon déguisement radical, je craignais de renvoyer une image de femme négligée, tout simplement.

Ça n’a plus aucun sens, ce n’est même plus une libération. Je suis découragée.

Je sais que c’est aussi ma faute, à moi de prendre du recul et de lâcher du lest, et que ma colère et mon épuisement sont des symptômes à traiter, pas des émotions dans lesquelles je vais puiser des choses positives pour avancer[efn_note]On pourrait parler aussi longtemps du positif, de comment c’est souvent une manière de taire nos colères et de balayer les injustices, et que c’est une nouvelle manière à la mode de policer les femmes, mais bon… il faudrait un autre article pour ça, n’est-ce pas.[/efn_note]. Il n’empêche que j’en suis là, aujourd’hui. En guerre. Pas vraiment très loin d’avoir l’impression de perdre, d’ailleurs.

Je vais prendre des vacances (d’internet, de la vie et de moi-même) et remettre les choses dans un ordre qui a du sens. Qui sait, peut-être qu’en mettant la tête suffisamment profond dans le sable, quand je la ressortirai en septembre le patriarcat aura été aboli ? On peut toujours rêver.



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Commentaires

49 réponses à “Et puis, épuisée”

  1. Kellya

    Je sentais qu’il fallais que j’attende d’avoir repris un peu td’énergie pour etre capable de lire cet article, et comme j’avais raison!
    Je te souhaite de bonnes vacances avec beaucoup de repos et d’amour. Prend bien soin de toi, ce devrait etre la priorité de chacun en cas de ras le bol général.
    Tu écris que tu n’as jamais eu le courage d’etre un role model, et pourtant, pour moi, c’est clairement ce que tu es: une jeune femme qui s’affirme, qui sait partager des informations intéressantes et des écrits magnifiques à tous. Qui ose parler de sujets difficiles… Sans le vouloir, tu es un exemple qui m’inspire et me donne un modèle pour essayer de m’améliorer.
    Pour le stérilet, ma mère était dans la meme situation que toi et du coup jen’ai jamais essayé de l’avoir vue souffrir pour rien. Je suis aussi une grande lectrice et j’essaie de me forcer à écouter des podcasts mais je n’accroch toujours pas. Mon chéri m’a fait écouté Les couilles sur la table et écoute beaucoup de podcasts féministes, ce qui m’impressionne toujours.

  2. Mary

    Bonjour Pauline,
    Nous ne nous connaissons pas mais je sens dans le ton de ton billet une détresse que tu fais bien de nommer.
    Je voudrais juste te dire, maladroitement peut-être et je m’en excuse d’avance, que le combat féministe est un peu comme le combat anti-raciste : il semble perdu d’avance et pourtant je ne vois aucun étranger qui lâche l’affaire face à des attaques subies, que ce soit en répondant par la révolte, par les études, par la répartie, par le laisser-dire, par le semblant de soumission, par le rire, par la provocation, par les bêtises, par …
    Personne dans une situation de faiblesse ne lâche l’affaire tant qu’elle est en vie, et si la réponse qu’elle donne à sa détresse est (jugée) inadaptée, rien n’est figé et peut/pourrait s’améliorer!

    Le féminisme est une cause noble, tant qu’elle ne te fait pas sombrer.. Je vois très bien ce que tu veux dire quand tu écris « je suis fatiguée d’être une femme » et je ressens moi-même par moments cette lassitude. Je suppose que tu te rends bien compte qu’il n’y a que les femmes qui sont capables de subir ce qu’elles sont amenées à subir (règles, maternité, railleries, soumission, objectification et j’en passe). Tu peux partir de là pour voir notre force malgré nos contradictions…

    Ne laisse pas les gens qui ferment les yeux sur ta peine te démolir, parce que c’est à ce moment-là que tu auras perdu la guerre. L’épuisement est là pour te rappeler qu’il y a besoin plus important à combler POUR LE MOMENT que la cause féminine : TA PROPRE CAUSE : et ça englobe ton corps, ta santé physique et mentale, ton amour de la vie et TOUT ce qui te fera du bien (si (ne pas) t’épiler pour aller à la plage en fait partie, fonce! si dire « fuck » au monde et à moi en fait partie, fonce! ) l’élan du coeur est toujours source de créativité, même s’il commence par des cris et de la détresse

  3. Je n’avais pas encore pris le temps de te lire, et je ne sais pas si mon commentaire sera très utile, si ce n’est pour te redonner mon soutien et pour te dire que je ne comprends que trop bien ta colère. Je te souhaite de l’apaisement et de la douceur, oublies un peu la réalité et nourris toi aussi et surtout de choses qui te font du bien et te donnent de l’espoir, ou juste, de l’évasion. J’aimerais pouvoir prendre un café avec toi pour oublier un peu tout ça et t’apporter mon soutien IRL, bientôt peut être <3 (j’ai peur de la maladresse de l’écrit parfois)

  4. Charlotte

    Me voilà cueillie dès le matin, infiniment touchée et bouleversée…
    Ce que tu dis fait pour moi fortement écho au Me and white supremacy Workbook de Layla F. Saad qui avait été une vraie claque. Je rêve que quelqu’un fasse le même genre de livre sur le patriarcat…

  5. Cécile

    repose toi bien, au plaisir de te te relire un jour :).

  6. Toupou

    Merci Pauline. Tes mots sont si justes et apaisants même si l’on y entend ta très légitime colère. Prends soin de toi, le chemin est encore long hélas. J’ai décidé de garder mes jambes velues cet été, c’est pour moi un acte militant. Pas facile de supporter les remarques et regards, mais j’assume.
    Je t’embrasse, prends soin de toi et celles et ceux qui comptent.

  7. Sans blague

    Parce que dans une version utopique de la vie, on respecterait les doutes, la fragilité, la tristesse et les vacillements, et on ne m’encouragerait pas à être quelqu’un d’autre que moi. » – Par ailleurs, ce commentaire risible démontre l’inanité de votre pensée, et je n’ose imaginer la qualité de votre « création » à l’aune de ce que je vois ici… Croyez-vous vraiment, très chère, que les hommes ne sont pas soumis à cela? Croyez-vous que c’est votre condition de femme qui vous oblige à ces concessions, qu’un homme avec des velléités artistiques par exemple ou une tendance à la douceur, à la faiblesse ou à la rêverie, ne va se trouver dans la même situation dans un monde où il faut être un « winner » à tous prix, un killer prêt à tout pour dominer le monde? Croyez-vous qu’un jeune gay moqué pour son manque de virilité ne va pas tenter de se conformer à l’ordre social et à se viriliser? Croyez-vous que le seul fait de vouloir être un homme gentil et bienveillant, « féminin », dans ce monde aux valeurs machistes de performance et de rendement et où la figure du chef viril est posée en modèle ne mettra pas un homme en porte-à-faux tout autant qu’une femme? Croyez-vous que ce qui est attendu de l’homme (être un « homme ») ne pose pas de problèmes à toutes ces génération de geeks tentés de rester adolescents et aucunement intéressés par devenir pater familias (mais je suis prêt à parier que dans ce cas, ironie suprême, vous méprisez précisément ces hommes qui ne veulent pas en être….)? N’avez-vous donc dans votre haine de l’homme une simple haine de vos propres échecs que vous cherchez à faire porter à d’autres et dans la recherche constante d’excuses grotesques (« je suis une femme c’est pour ça que j’échoue en tout ») pas la moindre petite étincelle de compréhension que la question du sexe n’explique que ce que vous voulez lui faire expliquer? Pourquoi ne pas simplement dire que vous ne cous reconnaissez pas dans la société, comme beaucoup d’hommes dans le domaine artistique, et partant de là chercher de vraies solutions plutôt que des excuses commodes? La médiocrité et la petitesse de votre pensée est confondante, et cela m’énerve finalement d’avoir même perdu mon temps à tenter de vous répondre.

    1. Linda

      Haine de l’homme, féministes à moustaches, aigreur, erreur de combat(s), auto-apitoiement, mauvaise foi, not-all-men, frustration, médiocrité, ton condescendant, les-hommes-ne-violent-que-les-top-models, nous-les-zhommes-on-souffre-aussi-hein…

      Je crois qu’on a coché toutes les cases du bingo du troll, félicitations!

      1. Sans blague

        Lisez le post ci-dessus et osez me dire que tut ceci ne s’y trouve pas? J’attends des arguments issus du texte, pas de vagues attaques ad hominem éculées.

    2. Sans-blague-machin-chose. Tu es dégoûtant. Et tu as moins d’empathie d’une cuillère à café. J’ose espérer qu’un jour tu te reliras et tu comprendras la violence gratuite de ton commentaire.

      Pauline, mes plus grosses ondes positives t’accompagnent. Ce n’est pas grand chose, mais je t’envoie un énorme câlin par télépathie.

    3. Angel

      Je suis une femme, je partage des idées féministes, mais je dois bien reconnaître que vous avez des arguments intéressants, bien qu’exposés de manière acerbes – je ne m’attarderais pas sur la forme de votre commentaire.

      Il est vrai que les hommes subissent cette pression de la performance depuis leur plus jeune âge, et subissent ce chantage qui veut qu’un homme se doit d’être viril s’il veut être aimé, désiré, réussir. Cette intériorisation de normes aliénantes se fait via les interactions sociales (famille, éducation, école, copains, travail…) : nous sommes tous interdépendants et je pense que nous sommes tous responsables – mais souvent inconscients – des valeurs que nous perpétuons entre nous, par nos mots, nos remarques, nos réflexions, nos actes envers nous-même et envers autrui. Responsables, mais aussi victimes de nos propres schémas issus de ce que nous inculque le système, parfois par la violence la plus inouïe.

      « Sans blague », à vous lire, on pourrait se demander si vous n’avez pas été vous-même victime de personnes qui avaient des préjugés à votre égard.
      C’est injuste d’être mis dans une case, de subir les conséquences de ce que vous n’êtes pas, de ce que vous ne voulez pas être, et même de ce que vous vous êtes tué à être par adaptation dans une société malade.

      Mais je peux comprendre ces femmes qui pensent ainsi : c’est le résultat de tant de souffrance qui marque la chair et l’esprit. Il est très difficile de ne pas faire une généralité de ce qu’on a toujours connu. De se relever d’un traumatisme en retrouvant les idées claires, de ne pas tomber dans la revendication extrêmiste pour se réparer des préjudices subis.

  8. Sans blague

    « je suis écœurée de voir si peu d’hommes prendre leur place (silencieuse et humble) dans la discussion » – Il faudrait peut-être vous demander pourquoi les hommes ne veulent pas en parler. Quelques pistes: l’attitude agressive pour ne pas dire haineuse des féministes contre tout homme qui ne dise pas « J’ai honte d’être un homme! A mort les hommes!! » et l’impossibilité absolue d’avoir un avis sans se faire illico insulter (vous allez d’ailleurs le démontrer, j’en suis sûr, en répondant à ce commentaire) ce qui n’ouvre pas à la discussion – des combats dont tout le monde se moque sauf les féministes et donc dont les hommes ne vont pas se mêler (si vous ne voulez pas vous raser, mais qu’est-ce qu’on s’en fiche? C’est votre choix, assumez, et pas besoin d’en parler comme si cela vous rendait hors normes! Moi je suis un homme, hétéro, et je me rase les jambes. Et alors? C’est mon affaire et tout le monde s’en fout!) – la tendance victimaire constante qui en devient ridicule (« pourquoi j’avais tout le temps peur dans la rue quand j’étais seule ») excusez-moi ma chère mais vous pouvez vous promener sans risque, faites-moi confiance, et cette façon pathétique de faire croire que tous les hommes sont des prédateurs sexuels infects, c’est d’un risible avéré et ce qui est amusant c’est que ce sont précisément celles qui ne sont jamais harcelées qui en parlent, sans doute pour se consoler en faisant croire qu’elles sont si désirables qu’aucun homme ne peut s’empêcher de les agresser… C’est risible. Le jour où vous verrez les relations hommes-femmes comme ce qu’elles sont, c’est à dire bonnes mais salies par une minorité d’abrutis libidineux, irrespectueux ou violents, et que vous vous concentriez sur ces abrutis en pactisant avec la très grande majorité d’hommes respectables, alors on vous écoutera. D’ici-là, vous serez vues comme des frustrées à moustache, et vous ferez du tort à votre cause. Cordialement

  9. Léa

    Merci Pauline pour cet article auquel nous sommes nombreuses, je pense, à une identifier. Comme toi je ressens cette fatigue, cette colère, cette impuissance à me faire entendre, notamment auprès d’autres femmes, l’impression qu’on a beau s’informer, ça n’intéresse pas notre entourage, qu’on a beau tenter d’éduquer, on n’est pas comprise et on passe pour la soeur/fille/cousine/copine reloue. C’est difficile (d’autant plus avec le retour de la grisaille dans le Nord). Je te souhaite de tirer le maximum de ton été pour te déconnecter, profiter du soleil quand il reviendra et trouver apaisement et compréhension auprès de ceux que tu aimes (rester enfermée avec mon amoureux et mes chattes m’aide beaucoup dans ces moments-là !).

    1. Merci à toi Léa ! La grisaille du Nord est en effet peu propice à l’esprit léger, j’aimerais passer mes soirées en terrasse avec les copains et à la place je suis sous un plaid et je me lamente ahah. Dans mon entourage proche, j’ai la chance de côtoyer des gens très d’accord avec moi sur ces questions fondamentales, mais il est vrai que j’évite de plus en plus la confrontation avec des personnes « lambdas » auxquelles il faudrait tout apprendre, tant ça me fatigue. Heureusement que mon petit chat est là pour ajouter un peu de douceur 😉

  10. Ton texte m’a beaucoup émue Pauline. Cela m’attriste tellement de savoir combien d’épreuves douloureuses tu as pu traverser et traverses encore et je souhaite sincèrement que tu trouves en toi et autour de toi la force et le courage nécessaires pour les surmonter. Je suis toujours admirative de la profondeur de tes écrits et de la manière dont tu parviens à nous donner matière à réfléchir à travers des partages pourtant si personnels. Alors merci de nous ouvrir ton cœur – avec franchise et humilité – et d’enrichir ainsi nos esprits !

  11. Denis

    Je ne sais même pas quoi dire…
    J’ai deja du mal à lire tellement ça me rend triste alors à vivre je ne peux même pas imaginer …

  12. David

    Peu de choses à dire, si ce n’est que je suis un homme et que je te lis. Que j’ai aussi d’autres lectures féministes. Je ne suis pas certains de tout assimiler, et je suis certain que je ne réalise pas ce que vous vivez non plus. Néanmoins, ces heures passées à lire pour nous, à retranscrire cela en quelques lignes, à essayer de nous éduquer, de nous apprendre, de nous sensibiliser, ne sont pas inutiles puisque cela m’a déjà servi à moi au moins, sûrement à quelques autres aussi. Et j’essaye à mon tour de retransmettre ce que j’ai compris à mes semblables masculins. Alors merci déjà pour cela.

    Je te souhaite apaisement et douceur.

  13. Merci pour cet article d’une authenticité et d’une audace folle.
    Encore une fois, tu brises plusieurs tabous.
    J’ai aussi beaucoup lutté contre mon corps, mes pensées, les autres, le monde …
    … et puis j’ai compris qu’il y a des combats que l’on gagne sans lutter et que la seule issue est de faire de notre mieux.
    Je repense ici à ton intention, le bonheur dans l’aisance.
    C’est peut-être une clé.
    Dans tous les cas, je te souhaite une belle déconnexion, beaucoup de repos, de la force et du courage dans ces épreuves.

  14. Maartje

    Merci et bravo Pauline pour cet article.
    Je me suis retrouvée dans beaucoup de tes mots. J’ai pleuré aussi. Pour toi, pour moi, pour nous toutes.
    Je te souhaite de bonnes vacances
    Take care

  15. J’ai tellement de pensées qui me viennent en te lisant que c’est un vrai tumulte, finalement je vais surtout te dire merci et bravo d’avoir posé ces mots toujours délicats (mais pas édulcorés pour autant !) sur cette révolte… Je comprends ce que tu veux dire en particulier sur les podcasts et contenus féministes qu’on s’échange seulement entre nous, j’en parcours et écoute beaucoup moins aussi. J’avais fait une exception pour Les Couilles sur la table justement parce que ça parlait de masculinité (j’ai la « chance » d’avoir quelques de contacts mecs qui sont militants et écoutent ce type de podcast, bien sûr c’est souvent des femmes qui leur conseillent…). De temps à autre j’écoute ou lis un article sur un sujet en particulier, quand j’ai l’impression que ça me donner un outil, une arme supplémentaire pour décrypter le monde, le quotidien, pour me défendre aussi. Mais la frontière entre la clé de lecture utile à prendre et le contenu accablant n’est pas toujours si nette…
    Tes mots font aussi échos aux partages de ces derniers jours sur twitter, sur l’épuisement militant en particulier dans les collectifs féministes qui accompagnent des femmes précaires, en danger, victimes de violences etc. Malheureusement personne n’a la solution miracle mais une chose est claire, et tu le soulignes aussi, c’est que notre énergie est précieuse et que les « zones de confort » sont parfois surtout des zones de sécurité pour se préserver, et il n’y a pas à rougir de le faire… (encore moins de ne plus consacrer de temps et d’énergie à palabrer avec des mecs pour qui les questions féministes représentent un sujet secondaire parmi d’autres !)

    Toutes mes pensées, j’espère qu’on finira par atteindre une société où le poids que peut représenter le corps, ses souffrances, ne sera pas lesté encore un peu plus par le patriarcat…

    1. Merci pour tes mots Irène !
      J’avoue que je traîne vraiment des pieds pour Les Couilles sur la Table… je lirai probablement le livre quand il sera sorti. J’ai réalisé en fait, qu’écouter un podcast me demandait de faire beaucoup plus d’efforts, que lire un livre, le format est bâtard pour moi : quand j’ouvre un livre je sais que je vais me plonger dedans, et je le lis à ma vitesse. Alors qu’avec un podcast je vais devoir composer avec les voix qui ne me captivent pas toujours (ou alors m’irritent carrément), je vais avoir la sensation que je peux faire autre chose en même temps mais en fait pas tellement… et les podcasts qui durent plus de 15 minutes et qui ne sont pas drôles, je n’ai vraiment pas envie de leur consacrer ma vie. (la meuf ULTRA pointilleuse)
      Je suis donc contente qu’il sorte en livre, là j’aurai enfin l’occasion de le lire. En attendant je peux continuer à faire du lobbying pour que mon propre mec, qui ne lit pas beaucoup, écoute les épisodes… ça lui fera les pieds.
      Enfin bref. Merci, et bises !

      1. J’écoute peu de podcast pour la même raison, en plus je lis plus vite que je n’écoute… j’arrive à faire autre chose en même temps mais seulement à quelques conditions (que ce soit une activité vraiment mécanique, zéro effort de concentration ; que le podcast soit vraiment intéressant; que personne ne puisse me parler en même temps etc) ! Je trouve aussi ça très chouette que ça sorte en bouquin, ça va toucher d’autres personnes, la diversification des formats

  16. Caroline

    Touchée par tes mots. Bravo et merci Pauline.

  17. Stellaire

    Plein d’amour et que l’été apaise ta peine et ta rage

  18. Je ne vais pas écrire un commentaire très intéressant, sinon te dire que je te comprends et je t’envoie mon soutien. Prends soin de toi cet été

    1. Merci beaucoup Laëtitia

  19. une lectrice

    Je ne sais pas quoi dire sinon que je comprends cette fatigue, moi qui n’ai pas la force ou le désir d’être militante et qui reste dans mon cercle de famille/boulot en admirant ton exposition au monde et en m’en nourrissant.
    Je t’embrasse et je souhaite que tu te reposes et trouves un équilibre, quzl qu’il soit.
    Ce qui t’est arrivé est terrible et bouleversant physiquement aussi. C’est à accepter et ça peut prendre du temps. Alors beaucoup de douceur pour toi.

  20. Merci 10 000 fois de te livrer et pour tes mots qui expriment à merveille la violence de ce monde.
    Je n’ai pas grand chose à dire de plus, si ce n’est que je te souhaite plein de courage pour affronter tout ça.
    Et je souhaite profondément que tu continues à nous décrire publiquement tes doutes et ta rage. Ta colère révèle tellement de talent.

    Merci et nique le patriarcat.

  21. Merci beaucoup encore une fois pour cet article magnifique, vivant, authentique.
    Oui, c’est décourageant ! Oui, c’est épuisant !
    (mais je crois qu’il y a de l’espoir quand j’entends mes fils m’encourager à ne pas me raser les jambes parce que ça ne sert à rien)

  22. On peut toujours rêver oui…
    Je me retrouve dans certaines de tes paroles. Je ne suis pas aussi aguerrie que toi au sujet du féminisme mais je me pose parfois les mêmes questions. Notamment à propos des poils. J’ai la flemme et je n’aime pas m’épiler (ça ressemble à une mutilation pour moi). Mais je n’ai pas le courage de porter un message en gardant mes poils. Et je suis persuadée que ce sera vu soit de cette manière, soit comme tu le dis comme de la négligence.
    Militer c’est épuisant et parfois on voudrait juste être.
    En tout cas repose toi bien !

    1. Ta phrase « Militer c’est épuisant et parfois on voudrait juste être », comme elle résonne en moi. Merci !

  23. Missbulle

    Plein d’amour, et merci pour cet article à coeur ouvert.

    Tu n’es pas seule à te sentir découragée, fatiguée de te battre et tellement, tellement en colère contre ce monde dont l’inertie et la réctance me terrifient. Mais l’alternative, quelle est-elle? Tout lâcher et se résigner? C’est un combat de tout les instants que nous sommes obligées de mener, contre notre gré. La solution de facilité ne nous est plus accessible, si elle l’a jamais été… Tout ce qui nous reste, c’est cet espoir un peu fou qu’on peut faire changer les choses, et cette colère qu’on doit gérer et transformer en moteur au lieu de la laisser nous consumer… Et bon sang, quel chemin de croix!

    Toujours est-il que je te souhaite des vacances loin de tout ça, parce que des fois, il faut juste dire stop.
    Prend soin de toi.

  24. Nespie

    Bravo pour cette article.
    Désolée pour cette colère que tu ressens, désolée pour toutes les choses qui t’arrivent parce que nous vivons dans un monde horrible où, en plus, il faudrait remercier les plus « puissants » pour le maigre confort apparent que nous avons. S’ils savaient ce qu’il se passe dans nos têtes ! Et quel incidence physique tout ceci a.
    Désolée dans le sens « je compatis, je te soutiens, je te comprends », et désolée aussi dans le sens « j’aimerai tellement que tout ça soit derrière nous aussi, juste pour respirer toutes ensemble ».
    Je ne te souhaite pas bon courage, je sais que c’est illusoire et que de toutes manières on n’a pas le choix.
    Je t’embrasse juste du coup.

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