Il y a quelques temps, j’ai été interviewée par deux étudiantes en cinéma qui réalisaient un court-métrage sur les rêves, ceux qu’on a enfant, ceux qu’on a adulte, et ce qui se passe entre les deux. J’avais un trac monstre, déjà parce que je ne suis pas née pour passer devant une caméra, ça, c’est sûr, et parce que c’est intime, les rêves, c’est difficile d’en parler. Mais j’ai eu envie de le faire, parce que s’il y a bien que cette année m’a apprise, c’est que mes rêves font partie de qui je suis. Alors j’avais envie de sortir de ma zone de confort pour aller à la rencontre de mes rêves.
Cette année, j’ai compris mon rêve. Je lui ai donné l’opportunité de s’exprimer, de déployer ses ailes. J’ai arrêté d’être terre-à-terre, juste le temps de réaliser, de dire tout bas puis un peu plus fort : je rêve d’être écrivaine. Si on tait beaucoup nos rêves, c’est sûrement parce qu’une fois lâchés dans l’air, on se sent mis à nus, et surtout jugeable, pointable du doigt. Eh, vous avez vu, son rêve est stupide. Irréalisable. Pour qui elle se prend ? et dans dix, quinze, quarante ans : Eh, vous avez vu ? Quelle ratée, elle l’a pas réalisé, son rêve. Moi, j’ai l’impression que j’ai vraiment choisi un rêve impossible. Regardé avec les lunettes de la raison, il est soit prétentieux, soit naïf, il ne suffira pas de travailler dur pour y arriver, il faudra espérer beaucoup. Et peut-être qu’il ne se réalisera jamais.
Et ça me va.
Maintenant que vous connaissez mon rêve, et que mes proches le connaissent aussi, il perd un peu de son caractère sacré. Il est moins intouchable. Je suis plus vulnérable, parce que vous êtes plusieurs centaines, peut-être milliers, à pouvoir me pointer du doigt. Mais cette année m’a aussi appris qu’en plus d’avoir confiance en soi, on gagne vraiment beaucoup à avoir confiance en les autres. Dans mon entourage de belles personnes (et vous en faites partie, vu comme chaque crise existentielle ici me vaut une vague d’amour à chaque fois plus grande), avoir parlé de mon rêve ne m’a jamais valu que du soutien. Les rêves nous rendent fragiles et forts à la fois. Puis c’est comme le bonheur, ça ne perd pas en qualité, en puissance, quand on rêve on tient toujours ça contre son coeur, en parler ne fait que rendre tout ça un peu plus vrai. Un peu plus réel, un peu plus possible.
Moi, je suis quand même un peu un être de raison. Je connais des pessimistes, des optimistes, je me situe dans le milieu un peu tiède où mon cerveau analyse tout et tire des conclusions que mon cœur choisit sciemment d’ignorer. Ma devise en toute chose qui implique l’espérance : Il faut se préparer au pire, mais attendre le meilleur. Figurez-vous que ce mantra me fait du bien et me permet de rêver en toute sérénité. Je n’ai pas besoin qu’on me répète que la vie est dure et le monde cruel. Qui a besoin qu’on enfonce comme ça des portes ouvertes ? J’ai besoin de savoir qu’il est possible que tout n’aille pas comme je le souhaite, mais que ça ne m’empêche pas de souhaiter. Je suis infiniment plus chill depuis que cette philosophie m’accompagne.
Peut-être que mon rêve ne se réalisera jamais. C’est possible, et c’est même probable. Et ce n’est pas grave, au fond. Si je n’avais pas ce rêve, je n’aurais pas rencontré de nouvelles amies, écrit une nouvelle puis un roman, je n’aurais pas eu le courage de me rendre à des conférences d’auteurs et autrices, je n’aurais pas fait lire ce que j’écris à des dizaines de personnes et eu la force de lire leurs retours pour m’améliorer (et me rassurer). Au final, même si mon rêve ne se réalise jamais, j’aurai tellement appris d’avoir cru en lui — et en moi. On forme une belle équipe, lui un peu fou et perché, moi qui dois constamment me hisser sur la pointe des pieds pour être à sa hauteur.
Mon rêve me grandit. C’est tout ce qui compte, n’est-ce pas ?
Je vous souhaite un très joyeux Noël. C’est un peu un rêve aussi, Noël, vous ne trouvez pas ? Moi, je fête le solstice, les jours qui s’allongent, et je garde au creux de moi l’espoir rassurant que bien qu’il ne fasse que commencer, l’hiver finira bien par se terminer. Et qu’on en ressortira grandi·es.
Je vous embrasse, vous dis à bientôt. Et merci.
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